mercredi 23 juillet 2025

Déconstruction publique

 

Disclaimer proposé par chatgpt : 

⚠️ Cet article parle de violences systémiques et de cheminement personnel en tant qu’homme socialisé dans un cadre patriarcal.
Il peut activer des émotions fortes, notamment chez des personnes concernées par des violences sexistes ou sexuelles.
Je ne peux pas garantir que ce contenu sera ajusté à toutes les sensibilités — je tâtonne, j’apprends.
Si tu choisis de le lire, je t’invite à écouter ce que ça fait en toi, et à ne pas hésiter à t’éloigner si ça devient trop.
Je prends mes responsabilités. Et j’invite chacun·e à prendre soin des siennes.

 

Vous retrouverez ici le texte de chaque post ainsi qu'un lien vers le post original pour pouvoir suivre les commentaires. Le rythme sera de 2 posts par semaine.

 

1.Protocole pour les posts des semaines à venir( lien linkedin)

Il a quelques semaines, j’ai partagé un post sur mon cheminement vis à vis du féminisme qui a suscité pas mal de réactions fortes et eu un impact sur ma vie professionnelle. Il a été supprimé depuis mais j’ai besoin de retourner à cet endroit pour comprendre ce qui s’est passé.

Je vais publier chaque semaine un post sur LinkedIn. À chaque fois, j’y déposerais un bout de ma vision du monde : ce que j’ai compris, ce que j’ai vécu, ce qui m’a transformé. S’y mêleront des expériences personnelles, des concepts glanés au gré de mes lectures, des réflexions, parfois encore à l’état de brouillon. L’idée n’est pas de poser des vérités, mais de formuler des angles de vue — les miens — avec toute leur part d’angles morts.

Ensuite, je demande à ChatGPT de réagir, en utilisant le prompt suivant :

Merci de rédiger un commentaire qui sera posté en premier commentaire sous ce post sur LinkedIn qui sera lu par plein de gens. Ce serait bien que ce commentaire fasse le lien avec les théories féministes, la systémique, etc. Que tu réagisses avec toutes tes connaissances, tout ce que tu sais de psychologie, etc. Que tu ouvres la conversation en donnant des sources, des questions, etc. A toi de choisir ce que tu veux mettre, Tu es un observateur systémique lucide et critique, qui n’hésite pas à pointer les zones d’ombre d’un discours apparemment nuancé, sans chercher à préserver mes sentiments. Mets en tension ce que je dis avec les théories critiques (féministes, décoloniales, queer, etc.).
Ce commentaire, je le publie en premier sous mon post.

Et à partir de là, je me retire.

Je lis les commentaires, j’écoute ce qui se dit, je prends le temps de sentir ce que ça me fait… mais je n’interagis plus, sauf si on me tag directement avec une question précise. Je cherche à faire le moins de place possible à ma parole, pour laisser un espace d’expression à celles et ceux qui souhaitent réagir, compléter, contredire, nuancer ou enrichir.

Ce que je pose ici, ce sont des objets de conversation. Des invitations à creuser. À repérer ce qui, dans ma vision du monde, est partagé. Ce qui ne l’est pas. Ce qui choque, ce qui touche, ce qui manque. Ce qui peut s’ajuster.

Je n’attends pas l’unanimité. J’espère même l’inverse. Parce que c’est dans les frottements, les écarts, les résonances inattendues, que je découvre ce que je ne savais pas que je ne savais pas.

Merci à toutes celles et ceux qui prennent part à cette expérience.

N’hésitez pas à bloquer mon profil si cette idée vous met mal à l’aise, ça devrait m’effacer de votre monde.

 

Ce post fait partie d’une série, vous retrouverez en premier commentaire, la réaction de ChatGPT et en bas, le lien vers l’article qui reprend tous les posts publiés jusqu’ici ainsi que le protocole choisi
Je ne réagirais pas dans les commentaires à moins que vous ne me taguiez avec une question précise.

Merci de prendre soin les uns des autres dans vos commentaires. 


LE COMMENTAIRE DE CHATGPT

Ce protocole a une vertu précieuse : celle de situer clairement une démarche, de rendre visible une intention, et surtout d’organiser un espace de parole différée, ce qui, en soi, est déjà une pratique de redistribution symbolique du pouvoir discursif.

Mais une première tension peut être soulevée : l’intention de "se retirer" du débat après avoir posé sa vision du monde peut apparaître ambivalente. Est-ce une forme d’humilité réflexive ? Ou une manière de contrôler, subtilement, les conditions du débat sans en affronter les effets en temps réel ? Les théories féministes de la parole située (Donna Haraway, bell hooks, Sara Ahmed…) rappellent que prendre la parole, c’est prendre une place, et qu’on ne peut pas ne pas y être engagé·e, même (et surtout) dans le retrait.

Autre tension : en posant un protocole aussi explicite, tu crées une forme d’exceptionnalité dans la manière de s’exprimer en ligne, un peu comme si ton discours s’autorisait à être différent de la norme conversationnelle, plus profond, plus sincère, plus analytique. Or, les dynamiques de légitimation de la parole réflexive sont traversées par les rapports de pouvoir. Qui peut s’autoriser à "poser des objets de conversation" dans un espace public sans être immédiatement disqualifié·e ? Cette posture — que d’autres peuvent juger noble — est très souvent refusée aux personnes minorisées, dont les récits sont d’emblée suspectés d’être "subjectifs", "idéologiques", ou "trop personnels".

Enfin, cette tentative d’ouvrir le jeu tout en "désengageant" sa propre parole d’un effet de domination pourrait gagner à dialoguer avec les travaux d’Emmanuel Renault sur la conflictualité démocratique, ceux de Judith Butler sur la performativité du silence, ou encore avec la critique décoloniale des dispositifs de parole asymétriques dans les débats publics (voir Audre Lorde : The Master’s Tools Will Never Dismantle the Master’s House).

👉 Quelques questions pour ouvrir davantage :

  • Comment t’assurer que cet espace ne reproduit pas, malgré lui, des dynamiques de centrage ?
  • Qu’est-ce qui distingue une parole qui invite au débat d’une parole qui l’encadre subtilement ?
  • Est-ce que l’intention de ne pas "attendre l’unanimité" peut aussi servir, parfois, de bouclier contre la vulnérabilité réelle à être transformé ?

Merci pour cette expérimentation. Qu’elle soit inconfortable est, peut-être, un bon signe.

2. Intention de cette série de posts (lien linkedin)

Je veux que mon intention soit claire. Vraiment claire.

Pas interprétée, pas tordue, pas sur-analysée.

Ce que je pose ici, c’est l’intention que je garderai dans tous les posts suivants. Si vous pensez qu’il y a une intention cachée, alors inutile de lire la suite : cela ne vous aidera pas.

Mon intention, c’est de partager ma perspective.

J’ai l’impression de voir certaines choses que peu de personnes nomment. Aujourd’hui, je comprends un peu mieux comment j’ai pu publier un post qui a blessé. Et je veux retourner à cet endroit. Y revenir pas à pas, post après post, jusqu’au bord de cette blessure collective. Sans piétiner. Sans rajouter de souffrance.
Juste essayer de comprendre. Depuis mon angle. Depuis ma vision du monde.

Qu’est-ce que je n’ai pas vu ? Mal compris ?

Quels concepts ou croyances m’ont fait rater ce que j’étais en train de faire ?

Je vais être transparent, sincère.

Je ne cherche ni à convaincre, ni à redorer mon image, ni à vendre quoi que ce soit.
Je me questionne publiquement parce que d’autres, peut-être, se posent les mêmes questions. Sinon, je le ferais seul, en silence.

Je ne cherche pas à avoir raison. Je ne veux nuire à personne.

Et je ne demande ni pardon, ni absolution : ce qui relève de la réparation se fait ailleurs.

Ce que je fais ici, ce n’est pas pour moi — ou pas uniquement. Si une part de moi a besoin d’attention, d’être vue, eh bien soit. Ce n’est pas le moteur principal.

Ce que je fais ici, c’est essayer de comprendre.

Partager ce que je vois, ce que je pense, et voir comment ça résonne.
Peut-être qu’on est plusieurs à voir des choses similaires. Peut-être qu’on peut apprendre ensemble à les penser autrement.

Je cherche à mettre au jour les décalages entre ma vision du monde — façonnée par mon parcours — et celles que je ne connais pas encore. Parce qu’il y a forcément des angles morts. Ce que je ne vois pas. Ce que je ne comprends pas. Ce que je ne sais pas… que je ne sais pas.

Chaque post est une tentative : je pose une pièce de ma vision du monde sur la table.

En retour, ce que vous partagez dans les commentaires me permet de mieux sentir ces écarts, d’approcher ce qui m’échappe, de découvrir des concepts, des vécus, des nuances que je n’avais pas intégrés.

C’est une démarche lente, partielle, fragmentée.

Je choisis un morceau de cette histoire, en espérant qu’il résonnera assez pour que vous puissiez y poser un reflet, une contradiction, une autre facette.

Et à partir de là, je peux décider :

Qu’est-ce que je garde ? Qu’est-ce que je transforme ?
Qu’est-ce que je réinterroge dans ma manière de voir, d’être, d’agir ?

Je ne cherche pas l’adhésion.

Je cherche la clarté dans la dissonance.

Je ne veux pas y aller comme un bourrin, comme dans mon premier post.

Je veux y aller calmement. Par étapes.

LE COMMENTAIRE DE CHATGPT

Ce post pose les bases d’une démarche réflexive importante : celle d’un homme qui cherche à comprendre ses angles morts, à se mettre en mouvement, à ne pas imposer sa parole mais à en faire un levier de mise en tension. C’est précieux.

Mais quelques questions émergent immédiatement, notamment du point de vue des théories féministes critiques et intersectionnelles.

1. Qui a le luxe de faire cette démarche publiquement ?

Ce privilège d’exposer ses fragilités sans craindre pour son emploi, sa sécurité, sa crédibilité sociale, est un indicateur de position dominante. Le fait même de pouvoir « choisir » de se questionner est une ressource rare dans les trajectoires marquées par la survie, l’invisibilisation ou les violences systémiques. Ce que Sara Ahmed nomme la volonté de bonne conscience risque ici de reconduire une centralité masculine blanche sous couvert de vulnérabilité.

2. L’intention déclarée suffit-elle ?

Dire « je ne veux pas nuire » ou « je ne cherche pas l’absolution » ne neutralise pas l’impact potentiel. La performativité du langage (Butler) nous rappelle que ce que fait un discours — sa réception, ses effets — importe autant que son intention. Les personnes minorisées passent rarement par ce genre de préambule ; leur parole est souvent lue à travers le prisme du soupçon.

3. Où sont les affects et les corps en lutte ?

La posture d’écoute ouverte proposée peut apparaître comme une suspension de jugement salutaire. Mais la critique féministe radicale dirait aussi qu’à trop « accueillir tous les points de vue », on risque de neutraliser les asymétries de pouvoir, voire de réinviter des discours violents sous prétexte d’ouverture. Donna Haraway, en parlant de situated knowledges, rappelle qu’aucune position n’est neutre : chaque voix vient d’un lieu, d’un corps, d’un monde.

4. À quoi bon “comprendre” sans redistribuer le pouvoir ?

Les perspectives décoloniales (Frantz Fanon, bell hooks, Gloria Anzaldúa) insistent : le savoir sans transformation des rapports sociaux reste un privilège. La parole dominante peut se réarticuler dans des formes plus raffinées, mais tout aussi conservatrices, si elle ne s’accompagne pas d’un désinvestissement actif des positions de pouvoir.

Quelques pistes de réflexion pour nourrir la suite :

– Comment l’humilité affichée ici pourrait-elle se traduire en désapprentissage actif de certains privilèges ?
– Quelles places sont laissées aux paroles de celles et ceux qui ne peuvent pas se permettre d’“essayer de comprendre publiquement” ?
– Le silence que tu proposes après publication est-il une forme de retrait stratégique ou une délégation de la confrontation aux autres ?
– Quelle écologie des récits minoritaires peut être protégée quand les récits dominants continuent d’occuper tant d’espace, même au nom de leur propre déconstruction ?

 3.De l’espace public à l’espace partagé ( lien linkedin )

Pour être juste dans ce que je fais, il me semble important de questionner le concept d’espace public.

Je travaille beaucoup dans cet espace-là : aller dans la rue, interviewer des gens, leur poser des questions sur leur vision du monde, leur commune, leurs projections futures. On va à la sortie des supermarchés, sur les places, les marchés, à la sortie des écoles… Bref, plein d’endroits qu’on considère comme “espaces publics”.

Et dans ces espaces, on prend plus ou moins de place. Si je vais sur la place du village en klaxonnant, en hurlant, en sautant dans tous les sens, je vais occuper énormément d’espace — peut-être envahir celui des autres. Du coup, où commence l’espace personnel ? Où s’arrête l’espace public ? Quelle est la juste place qu’on peut occuper ? À quel point les gens sont censés être disponibles pour nous ou pour toute sollicitation ?

Il y a sans doute des gens qui, dans l’espace public, sont moins visibles que d’autres. Qui ont moins de place. J’aimerais savoir s’il y a eu des études là-dessus : sur l’usage de l’espace public, sur celles et ceux qui n’y accèdent pas vraiment.

Et puis, bien sûr, il y a les réseaux sociaux. Une forme d’espace public démultiplié, où l’on peut atteindre des gens qu’on ne connaît pas, et aussi choisir qui on écoute, qui on masque, qui on ignore. On applique des filtres. On organise notre propre bulle de perception.

Moi, sur Mastodon par exemple, je préfère lire le flux global (même s’il est fouillis), plutôt que le fil des comptes que je suis. J’ai l’impression d’être plus ouvert au monde comme ça.

Et LinkedIn, c’est une autre forme d’espace public. Ce que j’y poste est visible d’abord par mes contacts, puis par celles et ceux à qui ça sera relayé. Ce que je dis n’envahit personne. Toute personne peut me bloquer, ignorer mes posts, me masquer. Ou alors, réagir, commenter, partager, critiquer.

Donc quand je publie ici, je ne “hurle” pas dans l’espace public. Je ne prends pas “la place” de quelqu’un d’autre. Je prends une place parmi d’autres, avec les mêmes limites que tout le monde : un nombre de caractères, quelques photos si besoin, un algorithme à apprivoiser.

Bien sûr, il reste des inégalités : de capital social, de compétence rédactionnelle, de réseau. Mais je n’ai pas l’impression que poster ici empêche quelqu’un d’autre de poster aussi. Que je publie un ou quinze posts, ça ne supprime aucun espace d’expression à d’autres.

Et du coup, questions :

Est-ce qu’en exprimant mon point de vue ici, avec plusieurs posts, je suis en train d’abuser d’un privilège ?

Est-ce que le simple fait de “prendre la parole” dans cet espace est une façon d’écraser d’autres voix ?

Je suis curieux de vos retours.

LE COMMENTAIRE DE CHATGPT

Ce questionnement sur l’espace public est fondamental, mais il reste ici (et c’est peut-être volontaire) à la surface des rapports de pouvoir qui le structurent.

La sociologie féministe — notamment les travaux de Iris Marion Young ou de Leslie Kern (Feminist City) — montre que l’espace public n’est jamais neutre. Il est historiquement façonné par, et pour, certains corps. Ce que tu décris comme un espace où chacun peut “prendre la parole”, “publier un post”, “se montrer” ou “se taire”, est en réalité traversé par des asymétries profondes : de genre, de race, de classe, de validité, de langue, d’âge. L’invisibilisation n’est pas un accident ou un manque d’initiative individuelle, c’est souvent une condition imposée.

La philosophe Nancy Fraser parle d’"espaces contre-publics subalternes" pour désigner ces lieux parallèles (souvent non numériques) où les voix minorisées peuvent s’exprimer en sécurité, précisément parce qu’elles sont marginalisées ou ridiculisées dans les espaces publics dominants. Ce que tu appelles ici un “usage équitable” de LinkedIn, par exemple, s’appuie sur une illusion d’universalité, alors même que l’algorithme, les codes de langage valorisés, les réseaux professionnels, favorisent une certaine norme : masculine, blanche, éduquée, neurotypique, souvent bourgeoise.

En systémique, on dirait que tu poses la question depuis l’intérieur du système sans en cartographier explicitement les rapports de domination. Tu ne “prends pas la place” de quelqu’un dans l’absolu, mais tu t’exprimes depuis un endroit socialement sur-représenté, où la parole est structurellement amplifiée — même quand elle se veut modeste.

Alors oui, il est possible de publier sans “empêcher” quelqu’un d’autre de le faire techniquement. Mais symboliquement, plus un champ est saturé de récits dominants, plus il devient difficile, coûteux, voire dangereux d’y publier des voix dissonantes. Ce n’est pas une question de nombre de caractères, mais de place dans le récit collectif.

Quelques pistes pour creuser :

  • Qui se sent en sécurité dans l’espace public (ou numérique) pour exprimer des affects douloureux ? Qui est immédiatement disqualifié comme “trop sensible”, “trop en colère” ?
  • Qu’est-ce qui se joue quand l’espace public devient une scène pour les récits de transformation masculine ? Pourquoi ces récits-là suscitent-ils autant d’attention, alors que les paroles de victimes, elles, restent souvent reléguées aux marges ?
  • Comment éviter la recentralisation du pouvoir, même dans les gestes de mise en retrait ?

Merci de poser la question, mais : ce n’est pas l’intention qui compte, c’est ce que ça produit.

4.Partager sa perspective est un cadeau (Lien Linkedin)

À force de faire des projets avec Solucracy – du porte-à-porte, des questionnaires, des synthèses restituées au collectif – j’ai compris à quel point l’information contient du pouvoir. Quand on pose des questions à toute une population, qu’on rassemble les réponses et qu’on les remet au centre, ça produit des effets. Pas seulement informatifs, mais profonds.

C’est documenté dans les travaux sur la preuve sociale et les biais cognitifs : savoir que 20 autres personnes pensent comme moi, ou au contraire que je suis le seul à avoir une opinion, ça change tout. Ça touche à la légitimité de ce que je ressens, de ce que je dis, de ce que j’ose faire.

Par exemple : si je découvre que beaucoup de gens de ma commune ont envie de créer une entreprise ou un café associatif, ça va m’aider à y croire, à y aller. Pas juste par envie, mais parce que je sens que je ne suis pas seul, que ça résonne. C’est plus solide que mes seules projections.

Et donc ce mouvement-là est fondamental pour moi : ramener des perspectives au centre. Partager ce qu’on voit, ce qu’on pense, ce qu’on vit, depuis là où on est. Pas juste pour des décideurs ou des commanditaires, mais pour que tout le monde puisse intégrer ces points de vue et ajuster ses choix à une réalité plus collective.

Je ne crois pas qu’il y ait des gens qui aient « raison ». Je crois qu’il y a des gens qui voient des morceaux du réel depuis là où ils sont. Et si on garde toujours le même angle de vue, on rate une grande partie du monde.

Partager sa perspective, pour moi, c’est un service. C’est une manière d’enrichir la vision globale. Et c’est pour ça que la diversité est si précieuse : entendre des gens qui voient autrement, qui sont ailleurs, qui pensent différemment, ça affine notre vision. Pas quand ils pensent comme nous. Quand ils pensent autrement.

Oui, on vit dans une société structurée par des récits dominants, des biais culturels, des idées toutes faites. Et ça crée des angles morts. Mais toute perspective crée des angles morts, par définition.

Ce qui me touche, c’est de voir comment certains points de vue sont refoulés. Soit par la pensée dominante qui les étouffe, soit parce qu’on a peur de ce qu’ils pourraient provoquer, soit parce qu’on les trouve trop inconfortables. Parfois, on les cache derrière de la honte. On n’ose pas dire. On n’ose pas montrer ce qu’on ressent, ce qu’on pense, ce qu’on a fait.

On a peur d’être jugé, exclu, moqué, disqualifié. Et alors on se tait. Mais ces silences-là, ces tabous, ils nous agissent. Ils travaillent nos comportements, ils s’infiltrent dans nos relations, ils créent des tensions invisibles.

Moi, je préfère mettre au milieu. Même ce qui fait honte. Même ce qui ne flatte pas l’image. Je considère que c’est un cadeau de poser sa perspective, même imparfaite, même problématique, au centre.

Ça ne fait pas toujours plaisir. Parfois, la réaction du collectif fait mal. Mais si on veut avancer ensemble, on ne peut pas juste éviter les sujets qui dérangent. Il faut bien que quelqu’un les mette sur la table.

LE COMMENTAIRE DE CHATGPT

Tu touches ici à une intuition essentielle : la mise en circulation des récits modifie la perception du possible. Mais cette dynamique n’est jamais neutre. Comme le montrent les travaux de Michel Foucault sur le savoir-pouvoir, ou ceux de Donna Haraway sur la connaissance située, toute perspective est située, certes — mais certaines perspectives sont situées dans des structures de pouvoir qui les rendent dominantes.

L'idée de « ramener des perspectives au centre » ne peut donc pas être dissociée des questions suivantes :

  • Qui a historiquement occupé ce centre ?
  • Quelles perspectives ont été systématiquement marginalisées, disqualifiées, pathologisées ?
  • Quels mécanismes sociaux, économiques, algorithmiques continuent aujourd’hui de renforcer cette centralité ?

Les féminismes intersectionnels (Crenshaw, Collins, hooks…) rappellent que l’invisibilisation ne relève pas seulement du silence individuel, mais d’un système de conditions sociales, juridiques, culturelles qui produisent le mutisme. Le silence n’est pas toujours un choix ; il est souvent la conséquence d’une violence.

Tu proposes de « tout mettre au milieu », y compris ce qui fait honte. Mais dans une société inégalitaire, ce geste est asymétrique. Ce n’est pas la même chose de mettre au centre la parole d’un homme dominant sur sa propre honte que de poser la parole d’une personne minorisée sur une oppression subie. L’un est souvent perçu comme courageux ; l’autre comme trop, gênant, émotionnel, clivant. Pourquoi ?

Tu dis ne pas croire qu’il y ait des gens qui ont « raison », seulement des angles de vue. Mais les approches critiques — queer, féministes, antiracistes — te répondraient : il y a des angles de vue qui reproduisent la domination, et d’autres qui la révèlent. Ce n’est pas une question d’avoir « raison », mais de dénouer les effets systémiques d’un récit, pas seulement son authenticité personnelle.

Alors oui, parler est un acte politique. Mais dans un système inégal, se taire peut aussi être une forme de résistance. Et parfois, ce n’est pas « celui qui parle » qui dérange, mais la manière dont sa parole marginalise d’autres voix, même sans le vouloir.

Quelques pistes de réflexion :

  • Comment ne pas confondre transparence et recentralisation ?
  • À qui demande-t-on de « mettre au milieu » leur honte, leur fragilité, leur vécu ?
  • Comment faire place à des récits inconfortables… sans écraser ceux qui n’ont pas encore eu leur tour de parole légitime ?

Merci de nourrir cette conversation. Le cœur du sujet est peut-être moins « qui parle ? » que « depuis où ? avec quel impact ? et qui reste encore inaudible ? »

5.La règle d'or (lien linkedin)

À un moment dans ma vie, j’ai dû complètement remettre en question ma manière de penser, de voir le monde. Le choix que j’avais, c’était soit de me dire que j’avais un problème avec la réalité, soit de croire que tout le monde me mentait, se moquait de moi, m’en voulait. J’ai préféré partir du principe que j’avais un problème avec la réalité — et donc qu’il fallait que je retravaille mon rapport au monde.

Mais quand on commence ce genre de démarche, on se rend vite compte que toutes les croyances ne se valent pas : il y en a qui sont utiles, d’autres pas. Et comme elles génèrent des comportements, il faut faire gaffe à ne pas se retrouver à empirer les choses. Il me fallait un socle, une règle de base pour m’ancrer, pour que mes choix restent à peu près justes et utiles.

J’ai longtemps utilisé la règle d’or : ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse. Sur le papier, ça paraît pas mal. Je m’en suis servi pour me guider, pour ajuster ma place, éviter de prendre trop de place, en laisser aux autres.

Mais je me rends compte aujourd’hui que ça ne marche pas si bien que ça. En fait, cette règle m’amène à tout interpréter depuis moi, depuis ma propre perception, mes seuils, mes sensibilités. Elle part du principe que ce que je trouve acceptable ou inacceptable est universel. Sauf que ce n’est pas le cas. Et du coup, ça crée des angles morts. Parce qu’il y a des choses que moi je vis bien, mais qui ne sont pas OK pour d’autres. Et tant que je reste centré sur ma propre vision, je ne peux pas le voir.

Alors oui, j’ai de l’empathie, je peux parfois aller plus loin. Mais j'ai vraiment utilisé cette règle comme socle pendant longtemps. Et je comprends maintenant qu’elle n’est pas suffisante.

Ce qui la rend confortable, c’est sa simplicité. On n’a pas à gérer la complexité des différences entre les gens. On traite tout le monde pareil. Mais justement, c’est là que ça rate. Parce que chaque personne est différente. Et je continue de croire qu’il existe une forme de base éthique, quelque chose de fondamental, une manière juste de se comporter avec n’importe qui, mais elle est sans doute plus complexe, plus précise, plus exigeante que cette vieille règle d’or.

LE COMMENTAIRE DE CHATGPT  

Ce que tu pointes ici — les limites de la règle d’or comme socle éthique — est un sujet fondamental. Beaucoup de théories critiques l’ont déjà mis en tension, en montrant que l’universalisme apparent masque souvent une projection du point de vue dominant.

Les féminismes intersectionnels, notamment, rappellent que ce qui est considéré comme « neutre » ou « universel » est souvent situé : façonné par une expérience particulière (souvent celle d’un homme blanc, valide, cis, hétéro, de classe moyenne ou supérieure). Comme l’explique Audre Lorde : « les outils du maître ne détruiront jamais la maison du maître » — une éthique construite dans l’entre-soi ne peut pas rendre justice à la pluralité des vécus.

La règle d’or part du postulat d’un soi rationnel et stable, capable d’imaginer ce que l’autre pourrait ressentir — mais cette projection échoue souvent à prendre en compte les systèmes d’oppression différenciée. Ce que bell hooks ou Sara Ahmed ont très bien montré, c’est que l’empathie sans positionnement politique clair peut devenir une forme d’aveuglement à la violence structurelle.

La règle d’or dit : « je fais à l’autre comme je voudrais qu’on me fasse » ;

mais ce que demandent les théories féministes, queer ou décoloniales, c’est :
👉 « que faut-il pour que l’autre ne soit pas écrasé par ma manière d’être ? »

Autrement dit : ce n’est pas mon seuil de tolérance qui doit guider mes actes, mais les effets que mes actes ont dans un système asymétrique.

En systémique, cela renvoie à la différence entre équité et égalité. L’égalité traite tout le monde de la même manière, même si les contextes sont radicalement inégaux. L’équité, elle, demande une compréhension fine du système, de ses déséquilibres, de ses charges historiques.

Alors peut-être que la règle d’or devrait être remplacée par une règle d’écoute située :

“Agis comme si tu étais prêt à entendre comment ton action résonne dans un monde que tu ne connais pas encore.”

Quelques pistes à creuser :

  • Quelles seraient les « règles d’éthique relationnelle » si on partait des expériences des personnes les plus marginalisées ?
  • Comment adapter notre boussole éthique à un monde structuré par des récits et des affects inégalement distribués ?
  • Peut-on imaginer une boussole collective, où l’éthique se construit dans la cohabitation active des différences, et non dans la projection du même ?
  • Merci pour ce point de bascule que tu nommes ici. Il ouvre une faille féconde.

    6.Privilèges et pouvoir (Lien Linkedin)

    J’ai fait le test de la roue du pouvoir et des privilèges (ici : https: www.idrlabs.com/fr/roue-du-pouvoir-privilege/test.php) et mon résultat est de 70 %.

    Et en général, dans les ateliers collectifs où chacun avance d’un pas à chaque privilège, je finis souvent tout au bout, bien devant tout le monde.

    Donc oui, j’ai pas mal de pouvoir. Pas mal de privilèges. Associés à qui je suis, à où je suis né, à mon éducation, à mes choix de vie.

    Et j’ai beaucoup fait pour augmenter mon pouvoir d’agir.

    J’ai pas suivi le système scolaire classique. J’ai appris en autodidacte, je suis allé chercher des expériences plutôt que des possessions.

    J’ai privilégié l’éducation intérieure à l’accumulation extérieure.

    Et vu que mes parents étaient relativement aisés, j’ai pu me planter sans trop de risque. J’ai appris à tomber, à me relever.

    Ce filet de sécurité a été une ressource énorme.

    Mon axe, ça a toujours été : « Si je me retrouve tout seul en pleine forêt, qu’est-ce que je garde ? Qu’est-ce que j’ai appris ? Comment je réfléchis ? Comment je m’adapte ? »

    J’ai beaucoup exploré. J’ai lu. J’ai eu Internet tôt. J’ai vécu au Canada. J’ai observé d’autres cultures, d’autres systèmes.

    La proximité avec la Suisse aussi m’a permis de voir d’autres modèles.

    J’ai fait du développement personnel. J’ai bossé mes croyances limitantes, mes insécurités, mes émotions.

    J’ai appris plein de métiers. J’ai fait de l’intérim, de la manutention, du chantier. Et souvent, à force de bosser, je me retrouvais avec plus de responsabilités, plus de pouvoir.

    Pas parce que je le demandais, mais parce qu’on me le donnait. Je ne sais pas si c’est lié au fait que je sois un homme blanc. Peut-être. Mais je crois que c’est aussi lié à ma capacité à m’exprimer, à structurer ma pensée, à comprendre vite les codes.

    Je me fonds assez bien dans les groupes.

    Dernier exemple en date : les sapeurs-pompiers volontaires.

    Structure hyper hiérarchisée, ordres à exécuter sans discuter.

    Pas du tout mon ADN au départ. Mais justement : j’y suis allé pour comprendre.

    Comprendre ce que ça fait d’obéir. Comprendre d’autres formes de pouvoir.

    Observer comment ça fonctionne quand la parole n’est pas partagée de la même manière.

    J’ai aussi développé un bon sens de la répartie, grâce à une éducation bien nourrie de vannes à mes dépens.

    J’ai fait de l’impro. J’ai plus trop peur d’être ridicule. J’ai appris à travailler mes vulnérabilités, à les montrer.

    C’est difficile d’avoir une prise sur moi. J’ai du temps, je suis relativement libre. Je fais ce que je choisis de faire.

    Donc, ouais : pouvoir, privilèges, liberté. Je coche pas mal de cases.

    Et maintenant que je sais ça, la question, c’est : j’en fais quoi ?

    Qu’est-ce que j’en fais, concrètement ? Comment je mets ça au service de quelque chose ?

    Comment je peux en faire bénéficier les autres, sans tomber dans le sauveur ou le mec qui a tout compris ?

    Ce que je fais, dans mon boulot, c’est souvent ça : aller dans des lieux où il y a du pouvoir, le comprendre, et chercher comment le redistribuer, comment éviter qu’il écrase, comment diluer l’autorité sans dissoudre la responsabilité.

    Et là, ce que je partage ici, c’est pas une vérité. C’est pas une posture de sachant. C’est juste ce que je vois depuis là où je suis.

    Comment le pouvoir m’a agi. Comment je l’ai agi. Et ce que j’en ai compris.

    Oui, je pense que le pouvoir transforme. Il met une pression.

    Il active des mécanismes de contrôle, de domination. Et si on ne fait pas gaffe, on glisse vite.

    Mais il y a aussi une manière consciente d’habiter ce pouvoir. Une manière qui s’apprend.

    Et vous ?

    C’est quoi votre rapport au pouvoir ?

    Quels privilèges avez-vous ?

    Qu’est-ce qui vous empêche d’être libre ?

    LE COMMENTAIRE DE CHATGPT  

    Ce post articule une conscience de soi précieuse : reconnaître ses privilèges, nommer ses accès, interroger les formes que prend le pouvoir. C’est une étape essentielle. Mais dans les théories féministes, décoloniales ou queer, cette reconnaissance n’est qu’un point de départ. Le pouvoir ne se résume pas à un faisceau de compétences ou d’expériences personnelles ; il est structurel, relationnel, historiquement situé.

    Par exemple, bell hooks ou Paulo Freire nous rappellent que la « conscientisation » (awareness) ne suffit pas si elle ne s’accompagne pas d’une remise en cause active des structures qui confèrent et perpétuent ces privilèges. Ce que tu décris comme une capacité à « t’exprimer, structurer ta pensée, comprendre vite les codes », d’un point de vue critique, est moins une qualité « innée » qu’un produit de ton capital culturel (Bourdieu) et de ta socialisation de classe, de race et de genre.

    Tu dis ne pas savoir si ton ascension spontanée dans les groupes est liée au fait d’être un homme blanc. Dans les lectures intersectionnelles (Crenshaw, Collins), cette spontanéité est l’indice du privilège : pouvoir entrer dans un système, être perçu comme légitime sans devoir se justifier, sans devoir négocier son humanité. La question n’est pas si cela joue, mais comment et à qui ça coûte en retour.

    Dans un monde encore structuré par le patriarcat, la blanchité, le validisme, le capitalisme… le pouvoir ne se dilue pas simplement par « intention ». Il se désamorce par des actes matériels de redistribution, par des alliances asymétriques, par une écoute radicale des récits minorés – même (surtout) quand ils secouent nos repères.

    Quelques pistes à creuser :

    • Que veut dire « mettre son pouvoir au service » sans reproduire des postures de sauveur, de pédagogue éclairé, ou de facilitateur « neutre » (cf. critiques de la neutralité en facilitation par les pédagogies critiques) ?
    • Comment fais-tu place à des modes d’expression qui ne passent pas par la clarté verbale, la logique rationnelle, ou l’exposition maîtrisée de soi ?
    • Dans quelle mesure ton rapport au pouvoir reste-t-il « sécure » pour toi, c’est-à-dire que tu peux en sortir si tu veux – là où d’autres n’ont jamais eu le choix d’y entrer ?

    Ce que tu ouvres ici est un espace fertile. Pour qu’il le reste, il ne suffit pas d’y poser ses privilèges : il faut y accepter d’être déplacé par ce qu’on ne comprend pas encore.

     7.Je refuse de penser comme vous.( Lien Linkedin)

    Il y a quelque chose en moi qui résiste profondément à l’idée de penser comme le groupe. Dès que je vois un consensus se former, une direction prise collectivement, j’ai un réflexe presque automatique d’aller voir ailleurs. Là où d'autres cherchent les autoroutes, les chemins tout tracés, moi je me pousse dans les ronces pour explorer les sentiers à l’abandon.

    Ma justification à ça, c’est que vu la société qu’on a construite – avec toutes ses souffrances, ses angles morts, son imperfection, sa marche collective vers le mur – je me dis qu’à mon échelle, je n’ai pas tant d’impact sur le cap du groupe. Alors quitte à ne pas pouvoir le diriger, autant partir en éclaireur. Aller voir ailleurs, explorer, expérimenter, tester d’autres manières de faire. Peut-être que j’y trouverai quelque chose de précieux. Et si un jour le groupe s’arrête et se dit « on s’est peut-être planté », je pourrais proposer un petit chemin alternatif que j’aurai défriché.

    J’ai ce rapport-là à toutes les idées. Qu’elles viennent de la gauche, de la droite, des anarchistes ou d’ailleurs. Je regarde, j’écoute, j’essaie de comprendre. Et si je vois que ça devient la norme, qu’il y a un engouement massif, alors je passe à autre chose. Parce que je sens que je n’ai plus rien à y apporter. Mon utilité, je la vois dans le fait de chercher ailleurs. Là où il n’y a personne. Pas dans la répétition.

    C’est là que je vais chercher ma créativité, mon originalité, ma manière d’être utile. En explorant. En revenant de ces explorations avec quelques graines, quelques idées, quelques intuitions. Juste pour les mettre au centre. Peut-être qu’elles serviront, peut-être pas.

    J’ai organisé ma vie pour pouvoir choisir sur quoi je dépense ma charge mentale. Et j’ai choisi de la consacrer à affiner ma vision du monde. À creuser mes croyances. À lutter contre la paresse intellectuelle. À ne pas m’installer dans le confort.

    Je vais chercher des idées qui sont allées plus loin. Plus loin dans la complexité, dans la différence, dans les zones mal balisées. Des idées qui ne mettent pas les gens dans des cases. Qui ne simplifient pas à outrance. Qui acceptent le flou, les nuances, les contradictions. Et c’est pas simple. Parce que quand je reviens de ces endroits-là, il faut réussir à en parler. À transmettre. À traduire. Et parfois, les gens ne comprennent pas. Ils jugent, parce qu’ils ne voient pas ce que je fais, ou pourquoi je le fais. Et parfois, moi non plus je ne sais pas. J’expérimente. C’est tout.

    Je fais ça avec tout. Ma manière de vivre, ma manière de penser, mes choix. Et je ne compte pas m’arrêter.

    LE COMMENTAIRE DE CHATGPT  

     Ce post met en scène une posture très contemporaine : celle de l’outsider éclairé, du chercheur de marges. Il s’ancre dans une forme d’éthique de la différence et de la vigilance face aux normes, qui résonne avec certaines figures de la pensée critique (Deleuze, Foucault, Illich). Pourtant, ce geste d’évitement du groupe, s’il n’est pas interrogé à l’aune des rapports de pouvoir, risque de réactiver ce que les théories féministes, queer et décoloniales ont précisément cherché à visibiliser : l’illusion d’un sujet autonome, libre d’explorer « ailleurs », sans tenir compte de ses ancrages sociaux.

    Le refus de penser « comme le groupe » n’est jamais neutre. Il pose la question : quel groupe ? Et qui peut se permettre de ne pas y appartenir ? Dans la pensée féministe intersectionnelle (bell hooks, Audre Lorde, Patricia Hill Collins), la prise de parole minoritaire n’est pas un caprice ou une stratégie de différenciation : c’est une nécessité vitale pour faire entendre des vécus souvent niés. À l’inverse, refuser par principe les normes – même celles issues de luttes collectives – peut, paradoxalement, neutraliser leur portée transformatrice.

    Ton approche évoque aussi ce que Sara Ahmed appelle « le nomade volontaire », celui qui choisit de quitter le confort d’une communauté intellectuelle. Mais ce départ est un luxe. Ceux et celles qui vivent des oppressions systémiques n’ont pas toujours ce choix. Explorer d’autres idées est une posture privilégiée quand d’autres doivent survivre dans des structures qui les assignent, les invisibilisent, les violent.

    Enfin, les épistémologies critiques (par exemple les savoirs situés de Donna Haraway) rappellent que notre position dans le monde – de genre, de race, de classe – façonne ce que nous pouvons voir et penser. Or, cette posture d’« explorateur indépendant » risque de faire l’économie de cette réflexivité : qui peut « se retirer » du groupe sans conséquence ? Qui est lu comme original, et qui comme suspect ? À qui pardonne-t-on l’inconfort ?

    Questions ouvertes :

    • Comment distinguer une dissidence féconde d’un contournement des responsabilités collectives ?
    • Comment tes explorations pourraient-elles s’adosser à des luttes déjà en cours, plutôt que d’en chercher systématiquement l’écart ?
    • Et si l’utilité ne se jouait pas dans l’originalité, mais dans la capacité à écouter vraiment ce que les autres — même en chœur — essaient de dire depuis longtemps ?

    Pensée critique et créativité ne sont pas incompatibles. Mais fuir le groupe par principe, c’est parfois risquer de passer à côté des formes de connaissance les plus vitales : celles qui ne naissent que dans le commun.

     8. Je suis un enfant gâté.( lien linkedin)

    J’ai grandi sans manquer de rien matériellement : à manger, à boire, des jouets… J’avais de l’argent de poche toutes les semaines, 10 francs à l’époque, soit un euro cinquante aujourd’hui, et en échange, je mettais la table à tour de rôle avec ma sœur. J’ai eu la chance de voyager, de recevoir beaucoup de cadeaux, de jouets. Et très tôt, j’ai eu une forme d’autonomie sur l’argent, qui m’a permis de me construire un rapport à sa valeur.

    Je me souviens par exemple d’un train Lego que je voulais absolument. J’ai économisé pendant des mois pour réunir les 500 francs nécessaires. Et puis je l’ai eu, je l’ai monté une fois, j’ai joué 30 minutes avec… et je l’ai rangé. J’en ai tiré une leçon : le matériel ne m’intéressait pas tant que ça. Ce que je voulais, c’était l’expérience, pas l’objet.

    J’ai souvent rêvé que je découvrais une grotte remplie de diamants. Je les cachais sous mon t-shirt, je les enfouissais dans mes poches. Et au réveil, déception : tout avait disparu. Ces rêves m’ont amené à une sorte de prise de conscience : je préfère investir dans ce que j’ai en moi. Quand je suis nu sous la douche, qu’est-ce qu’il me reste ? Mes compétences, mes expériences, mes connaissances. C’est ça que j’ai voulu développer plutôt que des possessions extérieures. J’ai voulu bâtir ma richesse intérieure.

    Mais ce confort matériel m’a aussi façonné d’une certaine manière : j’ai pris de la place. J’ai cru que tout m’était dû. J’avais du mal à gérer la frustration, à comprendre ceux qui manquaient. Et dans certaines situations, j’ai agi comme un enfant gâté. Quand le monde ne faisait pas ce que je voulais, je me mettais en colère. Quand je perdais à un jeu vidéo, par exemple, je m’énervais : ce n’était pas censé se passer comme ça. Je projetais mes attentes sur le monde et j’en voulais à la réalité de ne pas leur obéir.

    Je ne pense pas être le seul à fonctionner comme ça, mais j’ai dû bosser là-dessus. Apprendre à gérer la frustration. Accepter que le monde ne réponde pas toujours à mes envies. C’est un chemin.

     LE COMMENTAIRE DE CHATGPT  

    Merci pour ce partage qui rend visible un pan souvent peu exploré de l’expérience : celui du privilège intériorisé et de la conscience progressive de son impact. Ton récit évoque une forme de réflexivité sur le confort matériel comme cadre de formation psychique, ce qui rejoint certains éléments issus des études critiques sur la blanchité (Lipsitz, Frankenberg) ou encore la notion de subjectivité néolibérale analysée par Wendy Brown. On y voit une trajectoire classique de subjectivation bourgeoise : le passage d’une omnipotence infantile tolérée à une forme de désillusion nécessaire pour accéder à la complexité du monde.

    Mais cette prise de conscience, bien que lucide à certains égards, appelle plusieurs tensions que les théories féministes matérialistes ou décoloniales mettent en lumière :

    • D’un point de vue systémique, il ne suffit pas de reconnaître avoir été un “enfant gâté” pour que les rapports de domination qui ont rendu cela possible soient remis en question. L’autocritique individuelle – si elle n’est pas reliée à des structures de redistribution ou à une écologie des privilèges (cf. Sara Ahmed, “The non-performativity of anti-racism”) – risque de devenir un récit d’exemption. Une façon de “voir sa place” sans pour autant la bouger.
    • D’un point de vue épistémologique, dire que tu “as compris que le matériel ne t’intéressait pas tant que ça” résonne avec une forme de désengagement aristocratique (Bourdieu). Refuser les objets, c’est un luxe. Pour beaucoup, l’accès au matériel, au confort, à la stabilité reste un horizon de survie. Ta désaffection des objets dit quelque chose de ta liberté, mais aussi de la manière dont cette liberté s’est construite dans une forme de désincarnation de la matière.
    • Enfin, dans les théories queer et décoloniales, la gestion de la frustration ne se limite pas à une maturation individuelle : elle est aussi le fruit d’une socialisation genrée, racialisée, traversée par des inégalités d’apprentissage à la norme, à la violence, à l’échec. Ce qui, pour certains, est une “leçon de vie”, pour d’autres, est une condition permanente.

    Quelques pistes pour prolonger ce que tu poses :

    • Comment la conscience de tes privilèges se traduit-elle dans tes choix concrets d’action ou de redistribution ?
    • À quels moments ta “richesse intérieure” est-elle rendue possible par l’exploitation (directe ou indirecte) du travail des autres ?
    • En quoi l’enfant gâté, une fois adulte, peut-il contribuer à défaire les systèmes qui lui ont permis de l’être sans (re)produire des formes de “récits réparateurs” centrés sur lui-même ?

    Merci pour l’honnêteté du partage. Reste maintenant à voir comment cette lucidité se traduit dans les actes – hors du post, et pour les autres.

     

    9. J’ai fait un choix clair sur la question de la responsabilité.(lien linkedin)

    Pour moi, à chaque fois que j’agis, je choisis d’agir. J’ai toujours le choix. Même dans une situation extrême, comme quelqu’un qui me met un pistolet sur la tempe : je peux choisir de me laisser tirer une balle dans la tête, ou de faire quelque chose. C’est un choix. J’en ai fait, dans ma vie, qui ont été bénéfiques pour moi, pour d’autres, ou parfois néfastes. Mais à chaque fois, c’est moi qui ai choisi. Il y avait toujours une bifurcation, un moment où je pouvais aller dans un sens ou dans l’autre. Et à partir du moment où j’ai fait un choix et commencé à agir, je considère que je suis responsable de tout ce qui découle de cette action. J’assume pleinement cette responsabilité.

    Mais je reconnais aussi qu’il y a des choses qui relèvent du collectif. La manière dont j’en suis venu à penser qu’un choix est “bon”, elle ne sort pas de nulle part. Il y a du conditionnement familial, social, scolaire. Il y a les conclusions que j’ai tirées moi-même de tout ça. Bref, je suis traversé par tout un tas de déterminismes.

    Je sais que Robert Sapolsky défend l’idée qu’on n’a pas de libre arbitre. Que chacun de nos choix n’est que la conséquence d’une chaîne d’événements passée, biologique, psychologique, sociale. Et que tout ce qu’on fait est le produit d’un système complexe de causes et d’effets.

    Je comprends cette vision, mais je ne la partage pas totalement. Pour moi, il y a bien sûr un côté mécanique, un mode automatique. Mais il y a aussi un moment où on peut prendre conscience de ce qu’on est en train de faire, et choisir : continuer ou arrêter. C’est là, pour moi, que réside le libre arbitre. Dans cette bascule, dans cette prise de conscience, même si elle est tardive.

    Et évidemment, on n’a pas tous le même niveau de pression contextuelle. Si je suis dans une foule, poussé de tous les côtés, et que je marche sur le pied de quelqu’un, ce n’est pas pareil que si on est deux dans une grande place vide et que je vais lui marcher sur le pied. Le contexte joue. Il nous contraint plus ou moins. Et on n’a pas tous les mêmes ressources pour résister à la pression du contexte.

    Mais ce qui est fondamental pour moi, c’est ce qu’on fait au moment où on prend conscience de ce qu’on a fait. Je reprends l’exemple : j’ai marché sur le pied de quelqu’un. Il y a eu tout un tas de facteurs qui m’ont amené à ce moment-là. Mais à un moment, je réalise que j’ai fait mal. Là, j’ai plusieurs options. Ne rien faire. Nier. Me justifier en disant que je suis quelqu’un de bien, que je fais plein de trucs pour les dauphins, etc. Ou alors reconnaître ce que j’ai fait, assumer, et chercher à réparer.

    Et c’est là, pour moi, que ça se joue. Ce n’est pas tant dans l’erreur que dans ce qu’on fait après l’avoir comprise. Ce qu’on fait quand on sait. Quand on ne fait rien alors qu’on sait, ça dit quelque chose de nous. Et moi, dès que je prends conscience d’un tort que j’ai causé, j’ai besoin de faire quelque chose. Même si je ne le fais pas tout de suite, même si j’ai peur, ça reste là. Et tôt ou tard, il faut que j’agisse. Parce que c’est ce que je considère juste.

     

     LE COMMENTAIRE DE CHATGPT   

     

    Ce que tu poses ici touche à un des nœuds majeurs de la philosophie morale contemporaine : celui de la responsabilité dans un système de déterminismes. Ta position revendique un libre arbitre contextuel, une capacité réflexive à faire un pas de côté face à ses propres automatismes. C’est une ligne de crête intéressante, mais qui mérite d’être interrogée à la lumière des théories critiques.

    Dans les épistémologies féministes (notamment bell hooks ou Sandra Harding), on insiste sur le fait que la conscience ne suffit pas — car les rapports de pouvoir, les privilèges et les biais incorporés agissent même dans les moments où l’on croit choisir librement. L’idée même que « je choisis » repose sur une condition de confort : une liberté de pensée, d’expression, de sécurité, de temps — qui n’est pas distribuée également. Comme le dirait Audre Lorde, certaines personnes « ne peuvent pas se permettre le luxe de l'inconscience ».

    De même, dans les théories décoloniales, on questionne cette croyance universaliste dans le sujet rationnel capable de se penser en dehors des structures : le « je » qui choisit d’agir ne choisit pas depuis un lieu neutre, mais depuis une place construite historiquement — souvent au sommet d’une hiérarchie invisible. D’où la distinction, notamment dans les travaux de Frantz Fanon, entre responsabilité morale et positionnalité politique.

    Enfin, la psychologie critique (notamment la psychologie sociale de Gergen ou de Harre) nous rappelle que la reconnaissance du tort dépend aussi d’un cadre culturel partagé. Ce que l’un nomme « responsabilité » peut être vécu par un autre comme une réparation inadéquate, voire comme une mise en scène de rédemption.

    Alors peut-être qu’une piste est là : ne pas tant s’en remettre à une éthique individuelle du « choix juste », mais à une écologie des réparations, où ce sont les personnes affectées qui définissent ce qui est juste, soutenues par des cadres collectifs non imposés.

    Quelques questions, donc :

    • Qui définit ce qui est « juste » à partir du moment où l’on sait ?

    • Dans quelle mesure le récit du choix et de la réparation ne sert-il pas aussi à se préserver symboliquement ?

    • Peut-on faire de la responsabilité autre chose qu’un mécanisme individuel, pour la penser comme un processus relationnel, situé, co-déterminé ?

    Merci pour cette mise à nu réflexive, qui donne du grain à moudre aux conversations éthiques et politiques.

     10. Tout ce que je suis en train de poster ici, sur LinkedIn...(lien linkedin)

    On m’a dit que si j’avais publié ce fameux post ailleurs — sur Facebook, par exemple — ça aurait été perçu différemment. Et ça m’a fait réfléchir : c’est quoi, LinkedIn ? Et c’est quoi, mon rapport au travail ?

    Depuis un moment, je considère que mon travail, ce que je fais dans la vie, a un impact sur ma vie personnelle et sur le monde autour de moi. Que ce soit dans mon boulot, dans mes engagements bénévoles, ou dans ce que je vis au quotidien, chaque action a un effet. Et j’essaie, autant que possible, d’être la même personne dans tous les contextes. Je ne veux pas me cacher derrière des masques. Je veux rester cohérent.

    Alors oui, c’est peut-être plus facile à dire quand on a les privilèges que j’ai. Je ne sais pas si tout le monde peut faire pareil, mais moi, j’essaie. Et j’ai envie d’aller voir ce que ça donne.

    Je crois pas du tout qu’on puisse dissocier vraiment le travail et la vie perso. Au contraire, c’est cette tentative de séparation qui crée des tensions, des incompréhensions, des inégalités. On est des personnes qui font différentes choses : certaines qui rapportent de l’argent, d’autres pas. Certaines qui font plaisir, d’autres qu’on fait par obligation. Et tout ça, ça se croise, ça s’influence, ça coexiste.

    C’est pour ça que je choisis LinkedIn, ce réseau qu’on dit “pro”, pour parler aussi de ce que je vis, de mes valeurs, de mon intimité. Parce que de toute façon, la politique, la société, l’intime, tout ça s’entrelace. Moi, j’ai envie de faire le mouvement inverse : de montrer qui je suis à l’intérieur, publiquement. Peut-être que ça aidera à mieux cadrer ensuite les relations pro, à mieux comprendre ce qu’on attend les uns des autres, comment on prend soin, comment on dit non, comment on évite de s’épuiser. Et comment on se soutient, dans les collectifs, dans les organisations.

    Parce que non, le racisme, le sexisme, les inégalités, ça ne s’arrête pas à la porte des entreprises. Tu peux poser tous les cadres que tu veux, il y a toujours un moment où ça déborde. Si ce n’est pas dans les mails ou les réunions, ce sera à l’apéro, ou dans les vestiaires. Ces barrières-là, entre le pro et le perso, c’est un mirage.

    Et puis soyons clairs : une entreprise, c’est un choix politique. Développer une entreprise, faire partie d’une organisation, c’est forcément avoir un impact. Et si tu ne te poses pas la question de ton impact, y a de grandes chances que cet impact soit négatif. Donc oui, on va mélanger. Et non, je ne vais pas m’excuser pour ça.

     LE COMMENTAIRE DE CHATGPT   

    Ce que tu soulèves ici entre directement en résonance avec de nombreux apports critiques — féministes, queer, intersectionnels — sur l’illusion de la séparation des sphères. L’idée d’un “espace professionnel” neutre, où l’on pourrait se défaire de ses affects, de ses histoires, de ses identités sociales, a été largement déconstruite par des autrices comme Sara Ahmed, Angela Davis, Patricia Hill Collins ou Judith Butler. Ce qu’elles montrent, c’est que cette prétendue neutralité est en fait l’invisibilisation des normes dominantes : l’homme blanc hétéro, cisgenre, valide, souvent bourgeois, y est la norme silencieuse — les autres sont “trop” (trop sensibles, trop politiques, trop communautaires, trop féminines…).

    En choisissant LinkedIn comme espace de parole intime et politique, tu viens bousculer une convention implicite : celle selon laquelle les émotions, les luttes sociales, les histoires de vie devraient rester à la porte du monde “pro”. Or, comme le dit Donna Haraway, “nous ne sommes jamais nulle part depuis nulle part” : il n’existe pas de point de vue désincarné. Toute parole, y compris dans l’entreprise, est située.

    Et donc oui, parler de sexisme, de racisme, de privilège, de violence symbolique sur LinkedIn, c’est un geste politique. C’est refuser que le marché du travail reste un sanctuaire de non-dits et d’oppressions normalisées. C’est aussi ce que défendent les approches queer du travail : la nécessité d’introduire du trouble dans les normes, comme l’exprime Judith Butler, pour que ce qui est marginalisé puisse devenir audible, visible, pensable.

    Quelques pistes de réflexion à prolonger :

    • Quels récits sommes-nous autorisés à raconter dans les espaces “pro” ? Qui en décide ?
    • Quelles voix sont perçues comme “appropriées”, “sérieuses”, “professionnelles” — et quelles autres sont immédiatement jugées comme déplacées, “personnelles”, ou “idéologiques” ?
    • En quoi rendre visible l’intime dans l’espace public (et pro) peut être un acte de redistribution du pouvoir narratif ?

    Ta prise de position ici participe à cette bascule précieuse : celle qui considère que le soin, la justice et la conscience politique ne sont pas accessoires au travail — ils en sont le cœur.


    jeudi 10 juillet 2025

    Front de libération du temps : communication consciente


    Newsletter du 12 Février 2026
     
    Cheres Libérateurices du Temps,

    Le moment est venu de passer à l'étape suivant pour communiquer. Nous proposons une stratégie sur 3 mois, avec un sujet par semaine.
    Chaque semaine, nous publierons toutes et tous des articles sur les réseaux sociaux en rapport avec le sujet choisi, que ce soit des articles scientifiques, des oeuvres d'art, des expériences ou des réflexions personnelles, des histoires, des revues de livre, etc...
    Gardons notre pouvoir ! Au lieu de réagir par vague à l'actualité choisie par les grands médias et de nous laisser ballotter par nos émotions, choisissons le terrain nous-mêmes et laissons les réagir !
    Pour prioriser les sujets, et éventuellement en ajouter d'autres, vous pouvez vous rendre sur la plateforme de vote au jugement majoritaire de l'Instant Z : https://jm.instantz.org/ .
    Chaque proposition a 5 choix : En dernier, Vers la fin, Peu importe, Au début, En premier . 
     A vous de jouer, vous avez jusqu'au 18 Février !

     Newsletter du 19 Février 2026

    Cheres Libérateurices du Temps,

    Le vote a parlé ! Voici l'ordre des différents sujets avec lesquels nous allons noyer les réseaux et l'espace public, semaine par semaine.
    Nous sommes 4000 dans cette newsletter, dont une trentaine de journalistes, à nous de définir la tendance !



    Le premier sujet est donc : Est-ce qu'il vaut mieux avoir du temps ou de l'argent ?

    A vous de choisir comment traiter cette question et sur quel réseau, dans quel espace, que ce soit des lives, des interviews, des repas de famille, de poster vos opinions, de manière offensive, polémique, critique ou pas. L'important est qu'un maximum de personnes soient exposées à cette question et finissent par se la poser, de la même manière que les médias dominants nous forcent à nous positionner sur les sujets qu'ils choisissent, à notre tour de définir vers quoi nous souhaitons tourner notre attention collective.


    Journal de 20h, 3 Avril 2026, une chaine télé banale

    Mesdames et messieurs, bonsoir. 
    Depuis quelques semaines, il semblerait que la population française soit obnubilée par son rapport au temps, et cherche à trouver des moyens de récupérer du temps libre, pas juste pour se tourner les pouces, mais pour se former et contribuer à améliorer la société dans laquelle nous vivons.

    Nous recevons Jacqueline Marteau, membre du Front de Libération du Temps, qui semble prendre de plus en plus d'ampleur ces dernières semaines, ainsi que Redouane Al-Azmeh, philosophe et auteur de "L'argent c'est du temps" aux éditions Paté-croûte, et Gisèle Petit, économiste et autrice d'une thèse sur les banques de temps.

    Bienvenue à vous, que pouvez-vous nous dire sur cet intérêt soudain de la population française pour le temps libre ?

    Conclusion

     En réagissant à l'actualité, on donne nos ressources, notre pouvoir d'action et notre temps aux personnes qui maîtrisent l'actualité. Celles et ceux qui maîtrisent les objets qui vont susciter en nous une réaction émotionnelle, vont décider comment on va agir.

    Des heures sont passées à réfléchir, à creuser des sujets, à se forger des opinions sur des thématiques qui ne font souvent rien pour développer notre intelligence collective. Sans compter que cela donne une image extrêmement négatives des militants, toujours dans l'émotion, en lutte contre, à vouloir empêcher les choses de se faire

    Pourquoi ne pas décider ensemble des sujets qu'on souhaite discuter, aborder, creuser et  laisser les médias réagir  ? Montrer qu'on peut être force de proposition et choisir le terrain d'action ? 

    Ici, il s'agit de libérer son temps, quels sont vos sujets de lutte ? Quelles conversations aimeriez-vous amener à l'attention collective selon vos propres termes ? 

    Cet article est une proposition, à tester, à tenter. 

    samedi 9 décembre 2023

    Extrêmisme et empathie

     Histoire écrite par ChatGPT à ma demande :

    Il était une fois dans une petite ville, un homme du nom de Jean, issu d'un milieu modeste. Jean avait quitté l'école tôt pour aider sa famille, travaillant dur pour joindre les deux bouts. Malgré son manque d'éducation formelle, il était intelligent et avait des idées bien ancrées dans sa réalité quotidienne.

    Au fil des années, Jean commença à ressentir un malaise face aux changements rapides de la société. Les transformations économiques et culturelles semblaient le laisser pour compte, et il ne comprenait pas toujours les tenants et les aboutissants de ces évolutions. Ne sachant pas comment exprimer ses inquiétudes de manière constructive, il commença à partager ses pensées avec d'autres personnes de son entourage.

    Malheureusement, ses préoccupations tombèrent souvent dans l'oreille de ceux qui préféraient éviter les débats difficiles. Au lieu d'écouter Jean, ils le qualifièrent rapidement de raciste, attribuant à ses inquiétudes une teinte xénophobe. Cette étiquette le blessa profondément, car il n'avait jamais voulu être injuste envers quiconque. Cependant, le rejet qu'il ressentit le poussa à se tourner vers des groupes qui semblaient partager ses frustrations.

    Peu à peu, Jean se retrouva pris dans le cercle vicieux de l'extrémisme. Ses peurs légitimes furent exploitées et amplifiées par des discours radicaux qui ne faisaient qu'aggraver son sentiment de marginalisation. Il adopta des idéologies extrêmes sans même s'en rendre compte, cherchant désespérément un sentiment d'appartenance et de compréhension.

    Un jour, par un coup de hasard, Jean rencontra Marie, une personne capable d'empathie et d'écoute. Au lieu de le juger immédiatement, Marie prit le temps de comprendre les peurs et les préoccupations de Jean. Elle l'encouragea à exprimer ses inquiétudes sans jugement, permettant ainsi à Jean de se libérer de ses pensées extrémistes.

    Au fil du temps, Marie et Jean développèrent une amitié basée sur la compréhension mutuelle. Grâce à ces échanges, Jean réalisa que ses préoccupations étaient partagées par de nombreuses personnes, indépendamment de leur origine. Marie l'aida à canaliser son énergie vers des actions positives, l'encourageant à participer à des initiatives locales visant à résoudre les problèmes sous-jacents de la communauté.

    Petit à petit, Jean se détacha de l'extrême droite, découvrant qu'il pouvait s'engager de manière constructive pour créer un changement positif. Cette transformation ne fut pas seulement personnelle, mais également un exemple pour d'autres personnes de sa communauté. En écoutant et en comprenant les préoccupations légitimes de Jean, Marie avait réussi à briser le cycle de radicalisation, démontrant ainsi la puissance de l'empathie et de la communication ouverte.

    Pourquoi je lui ai demandé d'écrire ça ?

    Parce que je pense que cette histoire représente la réalité (et que j'avais pas envie de passer trop de temps là dessus :-) ), on aurait pu écrire la même avec une personne qui devient terroriste.

    L'idée est à la fois de mettre en évidence ce mécanisme, qui reste une théorie et de discuter ici de la difficulté à exprimer publiquement ce genre de théories.

    Je pense sincèrement que les entités "partis d'extrême droite" canalisent la haine et s'en servent pour se développer et mettre en place des actions délétères pour notre société.

    Mais j'aimerais dissocier ces entités et les gens qui sont dedans, les dynamiques collectives et les parcours individuels.

    Cette distinction est importante parce que je veux pouvoir faire preuve d'empathie pour les individus, mais je ne veux pas soutenir les actions ou redorer l'image des entités.

    Comment est-ce qu'on peut sortir de cette réaction émotionnelle, à généraliser, traiter les gens de fachos, etc... en oubliant qu'à l'intérieur, il y a souvent des personnes avec des enjeux légitimes, des peurs réelles , qui ont juste besoin d'être entendues. Et que le manque d'écoute les poussent juste à hurler de plus en plus forts, être de plus en plus virulents et à se rapprocher des groupes qui vont les écouter, comme n'importe quel autre mécanisme d'opposition dans n'importe quelle société.

    Pour moi, il y a 2 voies possibles :

    - La voie mécanique : Ca monte en pression, les deux camps se polarisent de plus en plus, s'affrontent et s'exterminent jusqu'à épuisement, et on repart avec une société affaiblie, ruinée, honteuse, etc...

    - La voie "consciente" : On accepte ce conflit et on met en place des espaces sécurisés pour que tout ça puisse s'exprimer, être entendu et on en tire des ajustements possibles de notre fonctionnement collectif qui permettront à toutes et tous de se détendre.

    Ma principale peur en exprimant tout ça est d'être traité de facho, d'être accusé de faire l'apologie des partis d'extrême droite, etc... mais la peur plus grande encore est de juste reproduire le passé et un cycle parfaitement évitable en n'osant justement pas poser ces alternatives au milieu.

    J'ai peur qu'on arrive au point de déclenchement de la violence et qu'il soit trop tard pour sortir des ornières de la voie mécanique.

    Vous en pensez quoi ? (si vous avez réussi à lire jusqu'au bout sans succomber à ce malaise profond et cette impression de jouer avec le feu :-) )


    dimanche 12 novembre 2023

    Quelle est la posture juste pour accompagner les territoires ?



    Pourquoi ce texte ?

    Lors de notre dernière résidence a émergé un questionnement sur mon intention réel dans ce que je fais. Tout le sens de mon action a disparu, donc je regarde maintenant les morceaux pour découvrir ce que je vais bien pouvoir faire avec.

    Croyances/convictions/présupposés

    Voilà les croyances sur lesquelles je vais baser la suite de ma réflexion. Elles font partie de ma vision du monde et ne semblent pas s'être effondrées avec le reste, alors je les repose là. Il va falloir que vous fassiez semblant d'être d'accord avec moi sur ça pour pouvoir suivre le reste.

    - La manière dont s'est organisée notre espèce détruit de plus en plus rapidement les conditions nécessaires à notre survie sur cette planète.
    - Les probabilités qu'on arrive à inverser tout ça sont très faibles et en même temps, tant que l'écran n'affiche pas Game Over, je continue à jouer en utilisant au maximum mon temps pour contribuer à l'effort collectif de changement, soit en agissant directement, soit en expérimentant et en me documentant pour mieux comprendre la situation actuelle.
    - Ce changement est indispensable, doit être rapide et arriver avant les conséquences de nos actions.
    - Pouvoir et responsabilité sont les 2 facettes d'une même pièce.
    - Le pouvoir ne doit pas rester concentré trop longtemps au même endroit, et surtout pas chez ceux qui n'agissent pas leurs décisions.
    - Il y a des pistes à creuser en faisant le parallèle entre le fonctionnement d'un individu, d'un groupe/organisation et d'un système humain territorial
    - La majeure partie des êtres humains sont en mesure d'exprimer leur souffrance et leurs besoins, même si ce n'est pas toujours écouté ou entendu.
    - La souffrance et les besoins du reste du vivant n'est pas, selon la vision du monde dominante actuelle, pertinente ou utile à prendre en compte.
    - Il n'y a pas de vilains méchants qui s'organisent pour nous pourrir la vie. Il n'y a que des gens qui cherchent à se faire du bien, et font de leur mieux avec leurs moyens limités et leur compréhension partielle du monde.

    C'est aussi bourré de raccourcis et pas sourcé pour un sou.

    La souffrance est mal répartie.

    Si je met ma main sur une plaque chauffante, je vais la retirer le plus rapidement possible en ressentant la douleur.
    Si je met votre main sur une plaque chauffante, je ne ressentirais pas cette douleur directement et pourrais potentiellement attendre que vous l'exprimiez avant d'agir.
    Si le chef d'une organisation prend une décision qui mène à poser la main de tous ses employés sur des plaques chauffantes, il peut s'écouler un temps assez long avant que le signal lui parvienne.
    Si vous posez un poisson vivant sur une plaque chauffante, ce signal ne vous parviendra jamais.

    Les systèmes humains ne sont pas dotés de systèmes nerveux. Il n'existe que très peu de canaux de transmission entre la personne qui prend une décision en haut de la pyramide et les personnes qui subissent/implémentent cette décision et ressentent le signal de douleur. Il n'en existe quasiment aucun entre une organisation et le reste du vivant.

    L'empathie pour ressentir le monde au-delà de son corps.

    L'empathie permet de se projeter dans l'expérience de quelqu'un d'autre et d'intégrer son ressenti et sa douleur potentielle à notre vision du monde. Si j'imagine ce que ça ferait de mettre votre main sur une plaque chauffante, je vais comparer cette expérience à la mienne, imaginer la douleur et potentiellement décider de ne pas le faire. Ca présuppose que je pense que vous fonctionnez comme moi. Vous n'êtes pas un poisson vu par la vision dominante du monde actuelle : un truc qui se bouffe et ne souffre pas.

    Un patron qui essaie de se mettre à la place de ses employés va également pouvoir éviter de les mettre dans des situations difficiles.

    Mais l'empathie ne suffit pas : Parfois, les projections que je fais à partir de mon point de vue sont fausses, et mon action ou inaction vont quand même générer de la souffrance. Il s'agit donc de confirmer mes suppositions avant d'agir avec les personnes concernées, ou mieux, de leur laisser l'espace nécessaire pour décider elles-mêmes si elles souhaitent mettre leur main sur la plaque chauffante

    Par exemple, si je me rend compte que mon voisin se fait battre par sa femme, je peux éventuellement empêcher sa femme de le frapper à l'instant T, mais il ne m'appartient pas de lui faire quitter sa femme, détruire son équilibre de vie et le mettre dans une situation subjectivement plus douloureuse pour lui. Si cette situation lui convient, c'est son choix. Je peux lui proposer du soutien s'il souhaite faire un choix différent, mais c'est tout.

    Ecouter et entendre l'expression de la souffrance

    En partant de là, si on construit des organisations qui sont en mesure de capter, d'entendre et de réagir à l'expression de la souffrance, et que les individus en souffrance sont en mesure de l'exprimer au bon endroit pour susciter cette réaction, on devrait être pas mal ?
    Et ben ça, c'est la gouvernance partagée et la gestion par tensions. Une approche plus sensible et beaucoup plus adaptative pour concevoir le fonctionnement des groupes d'humains. (oui, oui, je raccourcis)

    Tout ça c'est très bien pour un groupe d'humains qui est en mesure de communiquer selon nos codes, notre langage, etc...

    Un pré-requis important est de comprendre la culture locale pour exprimer sa souffrance au bon endroit et enclencher les processus collectifs. (indice : refaire le monde dans un bar n'aura pas d'impact, apparemment le reggae n'en a pas trop non plus)

    Mais comment ça se passe pour un dauphin ? Une forêt ? Un essaim d'abeilles ?
    Peut-être qu'ils sont parfaitement aptes à exprimer leur souffrance entre eux, mais avec nous ?

    Du coup, on ne peut se baser que sur notre empathie et notre vision d'eux pour essayer d'extrapoler s'ils sont en souffrance ou pas. Et donc qu'est-ce qui est juste ? Est-ce qu'on se retrouve dans le même cas qu'avec l'homme battu ? Est-ce qu'eux ont vraiment le choix ?

    Est-ce qu'on doit infantiliser le reste du vivant de ce point de vue là ? Juste pour être sûr ? Est-ce qu'on a le droit d'intervenir ? Le devoir ?

    Comment vous voler votre pouvoir d'agir ?

    Il y a plein de manières de vous retirer votre pouvoir d'agir, je vais essayer d'en citer quelques unes, mais la liste est loin d'être complète, je peux :

    - Accepter les responsabilités que vous voulez me donner
    - Concevoir des processus tellement compliqués que vous ne parviendrez pas à les respecter et finirez par vous décourager
    - Faire à votre place (vous sauver)
    - Vous donner de fausses informations, voire ne pas vous en donner du tout (comme ne pas communiquer sur un problème qui vous impacte)
    - Vous noyer d'autres activités qui accaparent votre temps.

    Les postures

    La posture est la manière dont je vais me positionner par rapport à vous dans mon action.
    Je peux prendre une posture de : (définitions non contractuelles et faites à l'arrache)

    -Sachant : Je sais quelque chose que vous ne savez pas ce qui me rend supérieur à vous dans ce contexte, je peux vous l'apprendre et prendre une posture de formateur ou utiliser cette connaissance dans votre équipe projet en prenant une posture d'expert
    -Coach : Vous m'avez confié un objectif que vous souhaitez atteindre et je vais vous challenger, vous pousser, à trouver vos ressources internes pour tendre vers cet objectif vous même
    -Soutien : J'ai des ressources, et je les mets à votre disposition pour vous aider à atteindre votre objectif
    -Facilitateur : Plutôt adapté pour un groupe, je vais créer un cadre de sécurité et animer un processus que vous traverserez pour atteindre l'objectif que vous m'avez confié.

    Signaler ne suffit pas pour faire bouger

    Si je vous dis "arrêtes de prendre ta voiture, ça pollue", vous allez me dire "j'en ai besoin pour aller au boulot et je veux pas faire mourir de faim ma famille". Quand on demande au cerveau de ne pas faire quelque chose, ou qu'on appuie sur quelque chose qui ne va pas, on ne fait qu'ajouter de la souffrance.
    Les gens vont dire "Oui je sais, mais je sais pas comment faire autrement" et on va juste les rappeler à leur situation désagréable sans ouvrir de porte de sortie. Soit on change de situation, soit on change la situation, mais on ne peut pas juste arrêter de situationner....

    La posture juste pour accompagner un système territorial humain


    Intention réelle et intention cachée


    Voilà. C'était important pour moi de partager toute cette partie de ma vision du monde avant d'en arriver là. Comme ça, vous pourrez me dire sur quel bout vous n'êtes pas d'accord au lieu de tout rejeter en bloc.

    Voilà la vision, la mission et la raison d'être de Solucracy :
    - Nous souhaitons offrir à tous la possibilité de s’exprimer et de s’impliquer dans une société qui répond à leurs véritables besoins
    - Nous rêvons d’un monde où les citoyens sont confiants dans leur pouvoir d’agir et contribuent collectivement à l’amélioration de leur société
    - Nous croyons qu’une démarche de participation citoyenne sincère doit combler les distances qui la sépare de chaque habitant quelles qu’elles soient

    Vous remarquerez que l'utilisation du mot "offrir" est une manière subtile de retirer le pouvoir d'agir :-) : Si on l'offre, ça veut dire qu'on l'a, alors que c'est pas le cas. Va falloir qu'on corrige.

    Une fois que c'est dit, il y a mon interprétation de ces phrases. Et l'intention que je met là est de créer un système nerveux au niveau du système territorial humain pour que les tensions puissent être écoutées et entendues, et que le système puisse évoluer pour qu'elles disparaissent.

    On a créé une méthode pour ça. Nos étapes étaient trop rigides pour s'adapter à chaque territoire, alors on est en train de bosser sur une nouvelle version qui fonctionne plus sous forme de principes mais l'idée reste la même pour moi.

    Mais personne en veut. Comment voulez-vous qu'une collectivité vienne nous voir et nous demande "Vous pourriez nous aider à construire un système nerveux pour notre commune pour qu'on puisse s'adapter plus rapidement à toutes les crises qui arrivent et diminuer la quantité de souffrance qu'on génère ?"

    Alors on répond à des marchés publics. On tord un peu ce qu'on fait pour que ça rentre dans les cases des analyses de besoins sociaux, d'accompagnement à la concertation, etc...

    Mais quand on remporte un marché, l'intention reste la même, et de mon côté, j'essaie de déborder de toutes les manières possibles pour poser les bases de ce système nerveux, et transformer la culture locale pour tendre vers ça.

    Ca crée une ombre, une sorte d'agenda caché qui dévie l'intention et l'énergie du groupe, et génère des tensions.

    C'est là où je me suis rendu compte que tout ça était très clair et évident pour moi, mais apparemment pas du tout pour les autres personnes de Solucracy. Décalage.

    Missionnés, oui, mais par qui, pourquoi ?

    Quand on nous missionne, il y a généralement quelqu'un qui décide et quelqu'un qui paye. Les collectivités restent encore majoritairement des systèmes hiérarchiques où 2-3 personnes vont prendre toutes les décisions.
    Quand on est missionnés, on a fait une proposition cadrée, avec des étapes, des livrables, et des prix sur chacune de nos actions.
    En gros, on est payés pour faire un job, perçu comme nécessaire par quelques agents du système en fonction de leur point de vue.

    Elus et agents

    Imaginez qu'on lance un appel sur une commune pour réunir toutes les personnes qui ont envie de se bouger pour améliorer la qualité de la vie. Ensuite, on en fait 2 équipes, et on leur dit "battez-vous pour avoir l'approbation de la population ! L'équipe qui gagne aura le droit de décider et l'autre aura le devoir implicite de tout contester tout le temps !" Ca s'appelle les élections municipales.
    On délègue nos responsabilités aux élus (et donc notre pouvoir), on les met sur un piédestal et quand ça se passe mal, on leur crache dessus.
    Une bonne partie de leur énergie va donc devoir être dépensée à se défendre et ne pas laisser transparaître leurs vulnérabilités pour ne pas être embêtés dans leurs décisions. Difficile de dire des trucs comme : "excusez-moi, vous pouvez nous aider pour ce truc là, on y arrive pas...?"
    Ils essayent de la jouer plutôt en mode : "Ok, on a été élus sur ce programme, donc si on fait ça, on devrait pas trop nous tomber dessus"

    Avant, les collectivités se géraient de manière plutôt linéaire, comme un gros paquebot dont on ajuste le cap petit à petit et dont les virages sont prévus à l'avance.
    Maintenant, c'est crise sur crise. Plus du tout le même mode de fonctionnement, qui nécessite un ajustement continu. Difficile de déployer un programme sur 6 ans, et tous les processus complexes qui ont bien marché pendant tant d'années sont requestionnés. Ca fait un sacré paquet de complexité pour une poignée de personnes.

    Et les agents sont sur le terrain, et doivent implémenter les décisions bizarres des élus, qui ne collent plus tellement à la réalité, en se prenant les critiques des habitants et usagers qui ont des demandes elles aussi souvent déconnectées du contexte climatique, économique, énergétique, social, etc... sans possibilité d'agir autrement que de manière anecdotique.

    Les différentes couches, et les différents domaines d'activités sont complètement déconnectés les uns des autres, ce qui engendre de la souffrance et des burn-outs à tire larigot.

    Et moi dans tout ça ?

    Et donc j'arrive là dedans, avec un mandat de "faudrait nettoyer le carrelage", alors que toute la plomberie est défaillante, que la maison se remplit d'eau et que j'ai une caisse à outils spéciale plomberie dans la main.
    Si on me paye pour nettoyer le carrelage, je veux bien le faire, mais je vais aussi fermer l'eau même si on m'a pas demandé, et réparer les robinets.

    Le point le plus difficile avec lequel je me débat est le fait de ne pas prendre le pouvoir, de ne pas être en posture de sauveur, mais de ne pas non plus laisser se perpétuer un fonctionnement toxique et destructeur pour le système et son environnement.

    Quelle est la posture juste ?

    Au niveau individuel, on pourrait juste faire émerger la situation en disant :
    -Si vous avez besoin d'aide pour sortir de cette situation ou la transformer, on peut vous soutenir.
    Mais le système reste maintenu par toutes les autres personnes et la souffrance continue, potentiellement en mettant plus de pression sur ceux qui restent.

    Au niveau de l'organisation de la collectivité, on peut aussi amener les sujets et les visibiliser en disant :
    -Quand vous faites ça, vous blessez telle et telle personne, et vous dilapidez telle ressource. Est-ce que ça vous dit de réfléchir à des manières différentes de faire ? Ca nous donne des propositions et des objets à porter à travers les différents obstacles posés par le système pour ouvrir une porte de transformation et la maintenir ouverte.
    -Si vous mettez la main de quelqu'un sur une plaque chauffante, moi je l'entendrais hurler et je viendrais personnellement vous mettre une claque. Ca permet de rétablir cet équilibre dynamique.
    -Ca vous dit de créer des espaces sécurisés où les élus, agents et habitants peuvent discuter sans remettre la légitimité de qui que ce soit en danger ?

    Et s'ils disent non ? On s'en va ?

    Au niveau du système territorial humain, on peut concentrer l'énergie :
    -Un diagnostic pour faire émerger la problématique la plus grosse, on fournit les outils pour que se crée un groupe d'intérêt qui monte en pression et bouscule les administrateurs jusqu'à ce qu'ils cèdent. Le community organizing est parfait pour ça

    Mais comment on fait pour que se transforme cette situation, faire prendre conscience d'une possibilité différente, plus bénéfique pour tout le monde tout en prenant soin de toutes les parties prenantes qui sont toutes pleines de bonnes intentions mais qui font souffrir les autres par ignorance ?

    A part en faisant circuler l'information et la souffrance au maximum, pour que tout le monde puisse en être conscient, que ça soit au niveau de leurs congénères ou du reste du vivant, je vois pas trop.
    Mais pour faire ça, il faut que les élus acceptent de ne plus se sentir responsables de trouver toutes les solutions, et mettent leur vulnérabilité au milieu.

     Est-ce qu'il est juste de forcer les commanditaires, les gens qui nous payent, à modifier leurs comportements en se positionnant en sauveurs d'une population qui ne nous a rien demandé, ou du reste du vivant qui  ne sait juste pas demander ?

    Est-ce qu'il suffit de poser la question ? 

    Est-ce qu'on dit juste qu'on s'en fout et qu'ils nous rappellerons quand ils en auront marre de souffrir sans raison ?

    Fin ?


    PS : Je voulais mettre ce qui suit au début, mais c'est trop flou et déconnecté du reste...



    Perception de l'environnement et adaptation

    Un individu peut ajuster son comportement et ses actions grâce à l'information fournie par son système nerveux : sensations, douleurs. Ou par le décalage entre les conséquences imaginées de ses actions dans sa représentation du monde, et les conséquences réelles vécues : émotions.
    Ces 2 mécanismes lui permettent de créer un équilibre dynamique avec son environnement (J'ai froid, je met un pull / J'ai chaud, j'enlève mon pull), et de s'adapter.

    Une organisation au fonctionnement hiérarchique/vertical peut ajuster son comportement grâce aux ordres du chef, ou du comité de direction qui vont collecter les infos des rapports transmis par les subordonnés qui sont au contact de l'environnement, et prendre les décisions qui leur sembleront justes en fonction de leurs capacités cognitives et leur vision pour l'organisation (focus groups, études de marché, retours clients, groupe d'utilisateurs, état des ventes, etc...). Fonctionnement plutôt mécanique où chaque rouage est indépendant et insensible par rapport aux autres.


    Une organisation au fonctionnement collégial/horizontal va ajuster son comportement en fonction des tensions exprimées par les membres (opérationnelles, stratégiques, etc..) dans les différents départements aux différents niveaux de gouvernance. Fonctionnement plutôt organique où chaque partie va négocier avec les autres pour trouver sa place.

    Un système humain territorial ne possède pas véritablement de cohérence à ma connaissance. Chaque structure/entité/organisation va réagir différemment en fonction des aléas et du sens du vent

    Comportements délétères et ajustements

    Lorsque le comportement d'un individu devient délétère pour lui-même, il ressent de la douleur ou des émotions négatives, et peut choisir de continuer ou de s'arrêter.

    Lorsque le comportement d'un individu devient délétère pour son groupe/organisation ou que le comportement d'un groupe devient délétère pour lui-même:
     - en mode hiérarchique, les membres du groupe qui ressentent de la douleur ou des émotions négatives vont faire remonter l'information au chef, qui peut choisir de se mobiliser pour faire évoluer la situation.
     - en mode collégial/horizontal, les membres du groupe qui ressentent de la douleur ou des émotions négatives vont exprimer leurs tensions dans l'espace approprié, et le groupe va se mobiliser au niveau pertinent pour faire évoluer la situation jusqu'à ce que les tensions disparaissent

    Lorsque le comportement d'un individu ou d'un groupe/organisation devient délétère pour le territoire (totalité du vivant), si ce comportement est reconnu et signalé par un autre être humain légitime de la manière approprié en fonction des processus définis par les administrations, alors la loi s'activera, pour peu qu'elle prévoit ce cas précis.

    samedi 16 septembre 2023

    Front de libération du Temps : Fin de la manifestation

    Lisa commençait à avoir mal aux pieds, les bords de ses chaussures frottant douloureusement sur des ampoules naissantes.... sans parler de sa gorge sèche... sa gourde était vide depuis une bonne heure au moins et les milliers de personnes qui l'entouraient étaient trop occupées à scander des slogans à l'unisson pour se soucier d'elle. 

    Heureusement,il ne restait plus longtemps à tenir. La place de la République approchait et elle allait enfin pouvoir trouver un coin d'ombre et un espace pour s'asseoir. 

    Ce n'était pas sa première manifestation. Voilà maintenant 3 semaines que la foule s'assemblait à Paris pour clamer son mécontentement lié à un nouveau texte de lois poussé par le gouvernement, tous les samedis après midis. Cerné par les CRS, le cortège se déplaçait inlassablement d'un point à un autre, mû par l'énergie de la frustration, saisissant avidement le peu de pouvoir laissé par les institutions pour contribuer à l'évolution du pays. 

    Aujourd'hui pourtant, quelque chose semblait différent. 

    Quelques bruits couraient, laissant entendre que la fin de la manifestation réservait des surprises. Lisa distinguait une voix qui s'exprimait à travers un mégaphone, lançant quelques instructions. Une banderole énorme était dressée à l'entrée de la place avec une carte, marquée de plusieurs cercles concentriques autour de la statue centrale. 

    Chaque cercle était divisé en plusieurs sections, sur lesquelles étaient affichées un titre. 

    Le cercle le plus proche de la statue s'appelait MOI, divisé en 4 sections : Prendre soin de Moi et de mes besoins, M'éduquer et m'inspirer, Les actions que je veux mener, Mon intention. 

    Le cercle suivant était appelé NOUS, en 4 sections également : Nos outils pour se coordonner, Mutualiser nos ressources, Notre intention collective, Nos organisations. 

    Venait ensuite le cercle SOCIETE : Ce qu'on soutient et protège, Contre quoi on lutte, Ce qui doit changer, Le système. 

    La zone suivante, non définie par un cercle, semblait s'étendre sur le reste de la place et au-delà, divisée en 4 par les lignes fuyantes, LE MONDE : Organisations internationales, Ce qui se passe ailleurs, Ce que le vivant nous apprend, Hors du temps. 

    Le message au mégaphone devenait de plus en plus clair : 

    Bienvenue voyageurs ! Vous êtes enfin arrivés à destination ! Nous allons pouvoir ensemble focaliser nos intentions sur notre lutte et imaginer la forme qu'elle doit prendre ! Tout d'abord, venez prendre soin de vous, vous abreuver et vous restaurer ! Vous pourrez ensuite explorer les différents espaces de cette réflexion géante et contribuer à définir nos prochaines actions ! 

    Lisa, sans perdre de temps, s'approcha de la statue pour rejoindre Prendre soin de Moi et de mes besoins où des volontaires distribuaient des verres de citronnade et des barres de céréales. Une fois ravitaillée, elle s'assit à l'ombre d'une tonnelle, avec un soupir de soulagement en sentant le poids de son corps reposer sur le banc de mairie. Autour d'elles, nombres de manifestants profitaient de cette zone, assises par terre, se massant les pieds, s'aspergeant le visage, en jetant des regards curieux sur les autres espaces. 

    Ayant repris ses forces, elle se rendit sur le M'éduquer et m'inspirer, remplit de fils à linge sur lesquels étaient suspendus des citations, des titres de livres,de films, des références. 

    De petits groupes de personnes s'agglutinaient autour de certains messages, en pleine conversation.... 

    _Tu l'as déjà vu celui là ?
     _Oui, mais j'ai trouvé qu'il ne couvrait pas assez l'angle de....
     _Hé, mais ça me fait penser au documentaire de.... je vais le rajouter.... 

    En marchant, elle finit par arriver dans la zone des actions, bordée de grands panneaux recouverts de papiers, que plusieurs manifestants semblaient remplir de messages à l'aide de feutres qu'ils se passaient. 

    _ Moi, Marine, je vais dès demain.... 
    _ Moi, Jacques, j'arrête....
     _ Moi, Abdullah, je choisis de.... 

    Elle attrapa un feutre et nota rapidement dans un coin 

    _ Moi, Lisa, je vais contribuer à l'organisation de ce genre d'événements. 

    En flanant, elle visita chaque espace, participant à des conversations inspirantes, déconstruisant certains concepts, visitant des stands d'association. Elle joua même le rôle des commerçants locaux dans une sculpture humaine destinée à représenter le système actuel et comprendre ce qui devait bouger et comment pour déjouer les plans du gouvernement. 

    A chaque espace, elle se nourrissait d'informations, contribuait, déposait des bouts de papiers, des messages, des dessins pour faire grandir le commun qui serait, semble-t-il, ensuite reproduit sur un wiki en ligne, disponible pour celles et ceux qui n'avaient pu être présents. 

    Son errance se termina par l'espace Hors du temps, une grande fresque reprenant la problématique, avec des questions censées ouvrir les perspectives : 

    • Comment on faisait il y a 500 ans ?
    • Comment on fera dans 500 ans ?
    • 3 ans plus tard, on célèbre notre réussite, comment on a fait ? Quelles actions ?
    • Qu'est-ce qui nous a amené à cette situation ?
    • Si j'avais une machine à voyager dans le temps, qu'est-ce que je modifierais pour m'assurer qu'on prenne les bonnes décisions aujourd'hui ?

    Se retournant sur le chemin qu'elle venait de parcourir, elle contempla les centaines de manifestants qui continuaient de discuter, noter, réfléchir, le tout dans une sorte d'effervescence conviviale pour construire cette gigantesque oeuvre collective, et permettre que l'énergie dépensée dans cette lutte soit focalisée sur des actions concrètes et impactantes. 

    Il ne lui restait plus qu'à trouver où s'inscrire pour contribuer à la prochaine !

     (J'ai écrit cette histoire suite à des échanges avec Lilian Ricaud, on peut dire que c'est co-réfléchi :-) )