dimanche 9 janvier 2011

Un monde en perpétuel mouvement

Au début, il n’y comprenait rien. Et, à vrai dire, il ne cherchait même pas à comprendre, se contentant de suivre son instinct, au jour le jour sans rien prévoir.
Puis un jour, d’on ne sait où, apparut la conscience de soi.
Et, dans ce monde en perpétuel mouvement, il commença à se fixer.
Au lieu de vivre, de n’être qu’un organisme vivant, il commença à « être ». Au lieu d’agir uniquement par instinct, il commença à tirer des leçons de ses expériences, à apprendre et pour cela, il lui fallait des souvenirs.
Et, dans ce monde en perpétuel mouvement, il se fixa dans le temps.
Grâce à son apprentissage, il développa des outils. Grâce à ses souvenirs, il se souvint où il les avait posés. Il se fabriqua des vêtements, de la vaisselle et tout un tas d’ustensiles censés lui faciliter la vie. Mais il lui fallait un endroit où les ranger, car il ne pouvait se déplacer facilement avec tout son attirail. Il trouva donc une grotte où lui et sa famille purent s’installer.
Et, dans ce monde en perpétuel mouvement, il se fixa dans l’espace.
Peu à peu, il aménagea cet espace qu’il s’était créé pour se faciliter la vie, s’aperçut que s’il voulait être en sécurité, il lui fallait contrôler cet espace, le stabiliser dans ce monde en perpétuel mouvement, construire une digue pour protéger son espace de l’assaut des vagues de la vie. Et vu que ça fonctionnait plutôt bien, il voulut agrandir cet espace et entreprit de cultiver les terres alentour et d'apprivoiser la faune. Il développa le langage et inventa des mots pour désigner ce qu’il parvenait à contrôler.
Et, dans ce monde en perpétuel mouvement, il tenta de fixer le monde lui-même.
Et il se développa, contrôlant de plus en plus de choses, en apprenant de plus en plus sur tout ce qui l’entourait. Mais dans cet environnement qu’il s’était construit, ce petit monde fixe, il restait une part d’incertitude, de choses qu’il ne comprenait pas encore, et de temps à autre, les vagues de la vie brisaient cette digue qu’il avait construite, noyant son monde dans l’incertitude et le mouvement. Il décida de donner un nom à ce qu’il ne comprenait pas encore et l’appela Dieu.
Et, dans ce monde en perpétuel mouvement, il se fixa dans une bulle conceptuelle.
Cette bulle était censée le protéger, lui apprendre et il renonça pour un temps à comprendre ce qu’il ne parvenait pas à contrôler, se contentant de définir plus précisément les bornes de l’incertitude à l’aide de rituels et de traditions. Si vous faites ça, disait-il, on ne sait pas pourquoi mais ça devrait bien se passer.
Jusqu’au jour où il décida à nouveau d’essayer de comprendre, de tester, de supposer et de repousser les limites de cette bulle et d’agrandir son territoire conceptuel, de chasser ce dieu qu’il ne savait pas contrôler. Et plus la bulle grandissait, plus dieu diminuait.
Et peu à peu, il comprit tout ce qu’il avait à comprendre et se rendit compte qu’il n’était plus retenu que par les limites qu’il s’était posé, qu’il était prisonnier de cette bulle. Il cessa d’avoir peur de ce monde en mouvement.
Et, dans ce monde en perpétuel mouvement, il se laissa aller…
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